Centre d'Études et de Recherches

sur les Phénomènes Inexpliqués

Explications

Le leader du CERPI patienta quelques instants pour que tout le monde soit installé à table et que le calme règne dans la pièce.

« J’imagine que vous désirez que je commence par le cas d’Océane puisque c’est celui qui vous a le plus tracassé dernièrement. Mais en fait, il n’a rien de surnaturel… »
« Mais tout ce rose et ce noir qu’elle s’impose avec obstination, omniprésents, cette tenue provocante à souhait, cette fascination pour le surnaturel, le merveilleux ? Son pouvoir ?
« Une chose à la fois, voulez-vous... Votre fille a développé ce que j’appellerais un phototropisme négatif. C’est d’une certaine manière le contraire du phénomène qui fait que les insectes sont attirés par la lumière. Cependant, il ne faut pas se fourvoyer dans le sens des mots qui prête ici à confusion.
Le noir n'est pas une couleur. En fait, une surface est noire car elle absorbe la lumière solaire sans la refléter. Elle capte donc toute l'énergie, les vibrations et la chaleur. C'est symbolique de l'amour dont Océane a besoin, des énergies qu'elle capte ou veut capter et de ses facultés à épuiser mentalement les personnes qui n'en sont pas conscientes. Le blanc, au contraire, est blanc parce qu'il reflète toutes les couleurs de l'arc-en-ciel et restitue donc les énergies, les vibrations. En plein soleil, Océane reçoit donc beaucoup trop de cette énergie et c'est là que cela l'épuise, elle, car elle ne peut le gérer. Le rose est également très symbolique, mais il faut tenir compte de ses nuances. Ce n'est pas le rose bonbon qui l'intéresse parce que trop mièvre et ne correspondant pas à son perfectionnisme mais le rose fuschia
(Océane s'écrie : "exact !"), qui dénote aussi l'amour qu'elle veut donner, la douceur, la sensibilité, la sensualité qui est sienne mais qui, associée au noir outrancier, génère des confusions dans le look : cela fait petite fée rose, petit enfant fragile et gâté qui ne veut pas vieillir car cela ferait aussi vieillir sa mère avec qui elle entretient une dualité, mais aux yeux de qui ne le comprend pas, cela fait aussi - pardonnez-moi l'audace des termes : "pute de luxe" !

Dès lors que l'on prend le cas de monsieur tout le monde, face à un tel look, les regards ne peuvent qu’être interrogateurs, mais Océane aime le mystère, c'est l'une de ses passions, elle aime aussi le provoquer ; ou lubrique, en ne voyant que la connotation péjorative de la tenue et en l'assimilant à celle d'une prostituée (de Babylone ?) Mais Océane aime attirer le regard, susciter la convoitise parce qu'elle a besoin d'amour sentimental, romantique, mais pas de cet "amour là, physique", du moins pas immédiatement, ni vénalement. Forcément, ces regards en porte-à-faux ne lui plaisent pas car ils sont entachés d'erreurs, procèdent d'une critique qu'elle ne peut évidemment pas accepter car on la voit comme ce qu'elle n'est pas. On va voir dans les bas-fonds alors qu'il est surtout question de beauté esthétique, voire même d'art. Océane est artiste dans l'âme et dans l'esprit, elle est bonne en littérature, elle pratique les montages photographiques avec succès, la photo est aussi un art. Les artistes sont souvent incompris, mais l'art et la sensibilité vont de pair. Un artiste jette son âme et sa sensibilité dans ses œuvres, il trouve son inspiration et son talent de source quasi médiumnique. En tous cas, les artistes ont souvent recours à un état second pour pouvoir produire leurs travaux, pour certains il s'agit de l'alcool, de la drogue, la médiumnité est un moyen ou un outil invisible mais qui se manifeste concrètement dans ces productions... »
L’intéressée se contente d’opiner du chef afin de ne pas interrompre son interlocuteur. Celui-ci reprend le tutoiement en lui parlant et, tout en continuant ses explications, il sort de sa mallette quelques documents à propos de la phobie sociale. Dès qu’elle les aperçoit, Océane comprend que l’investigateur avait déjà parfaitement cerné le problème avant même d’arriver chez eux !

« Ta phobie sociale provient, entre autres des agressions dont tu as été victime au lycée à une période qui correspondait plus ou moins à celle de ta puberté. Les classes étaient réputées pour être agressives, violentes, très turbulentes et tes "camarades" d'alors ont trouvé en toi non seulement quelqu'un qui se démarquait de leurs habitudes mais aussi qui se présentait dans sa fragilité avec l'étiquette "victime consentante" sur le front. Il n'en fallait évidemment pas plus pour qu'ils en profitent : c'est tellement plus facile ! Mais c'est aussi traumatisant dans une période de fragilité et de sensibilité exacerbée, une période dans laquelle la jeune fille subit des transformations dans sa chair et dans son esprit, des modifications hormonales, bref tout un ensemble de bouleversements parfois mal vécu. Chacun réagit donc avec sa propre personnalité mais on peut comprendre que face à de tels événements, il y ait un réflexe de repli sur soi-même, de refus de cette société hostile. C'est là que l'on se retranche dans l'obscurité de sa chambre, que l'on développe des fantasmes, des phobies, des complexes et que l'on se marginalise. On trouve un certain réconfort dans sa solitude rassurante, mais évidemment cette situation ne peut perdurer. Si un individu se tient volontairement à l'écart pendant assez longtemps, il retourne dans un certain incognito qui requiert de nouveau une période d'adaptation en cas de retour à la vie sociale et on entre en plein cercle vicieux puisque dès lors le regard critique des autres aura pour effet d'effrayer, avec de nouveau le réflexe de recul. On n'en sort pas ! Donc, quelque part, la lumière est un peu devenue synonyme d'agression, de danger au moins potentiel, de critique. On ne peut voir ce qui est dans le noir, ou les défauts sont mieux cachés dans l'obscurité. En plein jour, il faut que tout soit impeccable pour échapper aux regards critiques et aux commentaires désobligeants. Mais le perfectionnisme devient un défaut parce que trop poussé et il provoque lui-même les agressions, verbales par exemple, tout comme ces agressions entraînent le perfectionnisme réactionnel. Océane voudrait bien pratiquer la natation, mais à moins de se cantonner au bain de minuit, en aparté, la piscine ou la plage lui posent énormément de problèmes car il y a plein de monde, souvent bruyant, autant de gens qui l'effraient parce qu'ils peuvent oser leur regard (critique, toujours) sur sa personne dévoilée car en tenue minimale. Là, elle est forcée d'apparaître au grand jour et ses défauts physiques sont mis en lumière, vous voyez ?

C'est là que l'on développe des tendances anorexiques afin de répondre aux critères actuels de beauté féminine (et en général), que l'on évoque une chirurgie esthétique afin de contrôler certains petits défauts, c'est évidemment là aussi que l'on se retrouve, avec sa mère, dans une certaine phobie des voyages. Cela répond aussi à un besoin impérieux de toujours contrôler la situation. Madame E. ne peut prendre un moyen de transport quelconque parce qu'elle s'est sentie enfermée lors de son voyage au Maroc. Enfermée et menacée dans un monde étranger, inhabituel, où, - en plus - un individu lui faisait des avances, avances qu'elle a repoussées pour s'entendre prononcer une forme de malédiction. Tout cela a marqué son imaginaire, son subconscient, sa psychologie et elle a développé sa phobie. Elle refuse inconsciemment de se retrouver dans une situation semblable, un ascenseur, un véhicule fermé, l'autoroute parce qu'elle ne peut en sortir avant la prochaine bretelle... »
Il marque une pause, que la mère met immédiatement à profit pour poser une question :
« Mais, justement, cette malédiction... que faut-il en penser ? »

« Je ne peux pas présumer de ce qui a pu se passer réellement voilà près de vingt ans, au Maroc, à partir d'une culture qui n'est pas la nôtre, une religion différente. Mais cet événement vous a poursuivi. Peut-être pas vraiment de manière occulte, mais vous avez trouvé des points de concordance. Vous ne vous êtes pas mariés non en raison d’une impossibilité d’origine surnaturelle, mais parce que - pour une foule de raisons diverses - vous n’avez cessé de reporter la célébration à l’année suivante. Vous aviez tellement de préoccupations que vous ne vous êtes pas rendus compte que, sans le faire exprès, vous donniez corps à la malédiction dans une espèce de superstition à laquelle vous avez voulu croire. Il se fait que, par la force des choses, vous avez vous-même corroboré la sentence. Maintenant, vous projetez d’officialiser votre union, apparemment au plus fort des manifestations. Ce n’est pas cohérent ! Vous angoissez beaucoup parce que vous voulez croire à certaines choses, des faits subjectifs auxquels vous conférez un rapport au surnaturel. Si vous voulez être tout à fait tranquille avec cette prétendue malédiction, qui n’était sans doute le fait que d’une personne frustrée et humiliée qui a cherché à sauver la face par une "vengeance" immédiate qu’elle pouvait exprimer rapidement en vous faisant peur, il faut cesser de respecter l’adage selon lequel « la superstition est l’art de se conformer aux coïncidences » …
Je vous suggère de couronner votre mariage civil par son équivalent chrétien. Le mariage étant un sacrement, lequel implique lui-même le baptême et ce dernier étant à son tour une forme d'exorcisme, cette seconde officialisation - devant Dieu, celle-ci - devrait remettre toutes les pendules à l'heure. Cela repose sur une question de foi, sur un concept parfaitement établi par l'Église à laquelle vous adhérez.

Un autre point important réside dans le fait que vous avez souvent raconté cette histoire de malédiction lancée par un marocain borgne qui aurait bien voulu être à la place de monsieur, aujourd’hui et ici même. Océane connaît bien cette histoire et son esprit d’enfant n’a pas manqué de comprendre ce sorcier comme un second père potentiel. Si l’histoire s’était déroulée autrement, si vous aviez cédé à ses avances, il aurait pu être son père en effet… Quand Océane a commencé à se croire investie de pouvoirs paranormaux, d’être possédée ou d’être victime du « mauvais œil », elle a inconsciemment ou pas fait le rapprochement avec ce faux père borgne. Borgne ou mauvais œil », vous voyez le rapport ? Son imagination d’enfant a fait le reste. Ce marocain est devenu une sorte de monstre qui tyrannisait sa famille, pourrissait son existence, il était l’essence même de tous vos maux, les siens y compris. Tout cela provenait de lui, dans son esprit du moins. C’était son héritage, une forme d’atavisme par procuration et en y mêlant le surnaturel elle s’est sentie victime d’une intrusion dans son existence. Elle était pénétrée de lui, de son influence. C’est à partir de là qu’elle a imaginé une forme de viol dans sa personnalité. Elle a concrétisé cette idée dans ses fantasmes et là aussi l’hypothétique a pris un certain aspect de réalité, au point qu’elle ne savait plus s’il s’agissait seulement d’imagination ou si cela avait bien eu lieu… Tu comprends maintenant mieux ce qui se passe, Océane ? »

La jeune fille a les larmes aux yeux. Elle est dévorée de sentiments contradictoires. Un monde s’écroule autour d’elle, un monde dans lequel elle était devenue une sorte de reine des enfers dotée de pouvoirs redoutables qui la mettaient sur un piédestal détestable. En même temps, elle est soulagée. Elle comprend que, d’une certaine manière, tout cela n’était qu’un mauvais rêve qu’elle s’était fabriqué de toutes pièces. Elle est à la fois honteuse d’avoir ainsi été percée à jour, presque mise à nu. Elle sauterait bien à la figure de l’enquêteur pour lui arracher les yeux… ou le couvrir de baisers…

« D'un autre côté, vous devez cesser de tout attribuer au surnaturel. Vous m'avez dit que vous appeliez les orbes apparaissant sur vos photos des "entités" parce que vous aviez entendu parler de cela dans une émission télévisée. Dans cette émission, un illuminé quelconque aura prétendu que les orbes étaient des entités, des boules d'énergie, des unités plasmatiques, et pourquoi pas : des vaisseaux spatiaux extraterrestres ! Depuis, pour vous, les choses sont claires : les orbes sont des entités et rien d'autre.
En fait, c'est pratiquement tout le contraire ! La plupart du temps, dans 99.9% des cas, ce ne sont que des accidents photographiques, des défauts de l'appareil, des clichés pris dans certaines conditions particulières où vous photographiez des particules en suspension dans l'air.
(L’enquêteur ouvre son dossier, en retire tout un tas de pages qu'il remet à la famille E. Il s'agit de l'étude du CERPI sur les orbes qui explique les différentes causes pouvant provoquer des orbes : proximité du flash par rapport à l'objectif et en comparaison avec les appareils argentiques (Mme E. avoue qu'elle n'en avait que très peu avec ce type d'appareils), problème de balance des blancs, distance focale, zone d'orbes, arrière-plan noir (la chambre d’Océane, où apparaissent beaucoup d'orbes), diffraction ou réfraction de la lumière, polarisation, etc. C'est exactement le cas que l'on rencontre ici, mais on en oublie un, celui des photos sur lesquelles les orbes apparaissent en nombre invraisemblable, comme les bulles d'un bain et même plus.

"Vous m'avez bien dit qu'il y avait tout près d'ici, à cinq minutes tout au plus, plusieurs usines particulièrement polluantes dont les émanations provenaient jusqu'à vous, une odeur parfois infecte. Il y a fort à parier que vous avez donc photographié les particules de pollution en question. Pour le reste, si l'on regarde autour de la maison, que voit-on ? Des arbres en fleurs, des arbustes, de la végétation, des fleurs... Il y a donc tout ce qu'il faut comme insectes ou comme pollens pour obtenir des myriades d'orbes !

« Mais nous avons pris quantité de photos aujourd’hui même et il n’y en avait aucun ! »

« C’est le week-end, les usines sont fermées. »

Monsieur tente un autre argument, apparemment imparable :

« Les pollens et les insectes sont donc eux aussi en congé ? »

« Avez-vous remarqué la direction et la force du vent, Monsieur ? Celui-ci écarte très naturellement toutes les particules pouvant se trouver dans l’air. Mais quand bien même, il faut se rendre à l’évidence que l’apparition d’orbes sur des photos a toutes les chances, dans la plupart des cas, de trouver une explication parfaitement rationnelle.»

« Cependant, la maison est bâtie sur un ancien cimetière ! »

« Et les morts sont bien moins à craindre que les vivants ! D’ailleurs où sont donc passés tous vos spectres, vos fantômes, vos revenants, vos poupées voyageuses et vos télévisions ou radios indisciplinées ? Force est de reconnaître que, pour le moment en tous cas, il ne se passe strictement rien alors que vous m’aviez dit que les phénomènes étaient permanents et quotidiens. »
« C’est pourtant vrai, mais… »
« Sous le coup de l’émotion et du désarroi, face à ce qui vous paraissait une impérieuse nécessité quant à une intervention immédiate, ne vous êtes-vous pas sentis un peu obligés d’exagérer, au moins un peu, les faits ? »
Madame soupire et avoue :
« Ma foi… si ! C’est vrai. Mais je peux vous garantir que nos télévisions ou radios se mettent parfois toutes seules à fonctionner. Ce n’est tout de même pas normal ! »

« Je peux bien vous l’accorder, Madame. Vous ne me direz cependant pas le contraire, vous avez des télévisions dans toutes les pièces, pratiquement sans exception. Je m’étonne d’ailleurs de ne pas en avoir trouvé aux toilettes ! (rires) Mais vous le savez comme moi, tout cela coûte cher s’il faut tout acheter, or votre situation financière n’est pas des plus aisées. Tout à l’heure, lors de notre discussion, Monsieur m’a expliqué qu’il avait obtenu ces appareils de seconde main, à prix modique, il en a retapé plus d’un. Il n’est donc pas étonnant qu’il se produise de faux contacts mais aussi que des réglages de mise en veille automatique programmés aient été laissés en fonction. Voulez-vous vérifier, Monsieur E. ? »

Le père, piqué au vif et un peu curieux, s’affaire immédiatement à ses récepteurs. Il lui faut un certain temps pour jongler avec les télécommandes et trouver les menus adéquats. Au bout d’un certain temps, il revient à la table et confirme, un peu confus, que tel était bien le cas.

« Si je comprends bien – reprend la maman – nous sommes tous fous et juste bons à nous faire enfermer ? »

« Ne nous emportons pas, Madame ! Je ne prétendrais jamais une chose pareille ! J'ai dit que la plupart des orbes trouvaient leur explication dans des causes tout à fait naturelles. Mais pas tous, pas systématiquement, pas à 100%, mais presque. Il en reste donc d'autres qui n'appartiennent pas à cette catégorie. Souvenez-vous, lorsque nous avons mis notre étude en chantier, nous nous sommes basés en grande partie sur vos photos. Parmi celles-ci, plusieurs ont pu être cataloguées, divisées en catégories d'orbes différents et présentant donc des particularités remarquables. Il s'agit par exemple de l'orbe mat qui a été photographié au bas de l'escalier. Il s'agit notamment aussi de l'orbe photographié devant l'armoire du grenier, celle sur laquelle se trouvent les poupées "malsaines", la crèche de Noël, les armes asiatiques. Il y a aussi "l'orbe mobile". Et ces endroits communiquent tous avec la chambre d’Océane. Il n’y a pas forcément de rapport sur le plan des orbes, mais sur un plan strictement occulte, ici nous abandonnerons la science, tout se tient et je vais maintenant vous donner les explications qui vous manquent... »

On était partis pour le deuxième gros volet de la question... Pour ce dernier la maîtresse de maison attaque tout de go, impatiente d’en venir au fait.

« Oui, Monsieur, il est maintenant temps que vous nous donniez toutes les explications : notre maison est-elle hantée, oui ou non ? Océane est-elle une sorcière ou pas ? Nos ennuis vont-ils enfin cesser et allons-nous retrouver enfin une vie normale et tranquille ? »

La réponse de l’enquêteur est calme, assurée, la famille est suspendue à ses lèvres.
« Comme je vous l'ai dit, Madame, à 99.9% votre maison est parfaitement normale. Beaucoup de choses s'expliquent essentiellement par des questions de psychologie que je vous ai d'ailleurs exposées. Beaucoup d'autres ne relèvent que du subjectif et de votre propension à tout attribuer au surnaturel. C'est un peu votre péché mignon. Mais, non, les appareils électriques qui se dérèglent ou ne fonctionnent pas comme ils le devraient ne démontrent pas une hantise, cela arrive parfois chez moi aussi. Pour certains ce sont des imprimantes qui impriment en dehors de toute sollicitation ou des GSM qui sonnent sans qu’il n’y ait qui que ce soit au bout du fil.

Comment cela se peut-il ? Nous l’expliquons dans notre site. Quantité de gens reçoivent des appels bidon de personnes distraites qui oublient de verrouiller le clavier de leur portable et celui-ci se déclenche dans leur poche. Les imprimantes peuvent libérer leur mémoire interne hors propos. Cela n’a rien de mystérieux ni de surnaturel. Il en irait autrement si la page qui sort présentait le portrait de Padre Pio ou d’un monstre grimaçant, mais encore faudrait-il qu’il n’existe aucun fichier-image correspondant sur le disque dur, aucune possibilité de communication Bluetooth, etc. Mais parfois aussi, les choses sont plus compliquées que cela. Comme je vous l'ai dit, il arrive que des gamines en pleine crise de puberté développent une sensibilité particulière et même de la médiumnité, elles communiquent avec des esprits, sans trop maîtriser la chose, elles "s'inventent des copines imaginaires", comme "Charlotte qui chantait au plafond..." (Mme E. et Océane sursautent ! Personne n’a évoqué cet épisode devant lui, comment donc peut-il savoir ?) Il y a aussi de ces familles qui accumulent involontairement les ennuis en appelant elles-mêmes les entités, voire même en les «fabriquant» inconsciemment de toutes pièces, sans pour autant qu'elles ne soient strictement fictives :
elles prennent corps et obtiennent leur autonomie. C'est notamment le cas de celles qui accordent trop d'importance au surnaturel et le voient partout : il finit par devenir réalité, du moins en partie...

Dans votre cas, il est facile de comprendre qu’Océane a souffert, au moins un peu, de ne pas avoir eu de frère ou de sœur, d'être enfant unique. Bien sûr, elle était gâtée, choyée, soignée aux petits oignons, mais il lui manquait aussi un compagnon de sang, ou une sœur de chair. De votre côté, c'est un peu pareil : vous avez désiré un autre enfant, vous avez même plusieurs fois été sur le point de réaliser ce désir, malheureusement la vie en a décidé autrement. Cela ne vous a pas empêché d'en souffrir aussi et vous avez compensé, Océane et vous, par l'accumulation de poupées, de nounours ou d'autres bibelots du genre, dont certains ont été acquis dans des brocantes, en étant donc potentiellement chargés de toutes sortes d'énergies, éventuellement néfastes. En tous cas, vous avez focalisé sur ce mirage, c'est devenu une "obsession refoulée". Vous aviez omis, dans l'instruction de l'investigation, de nous signaler toutes les interférences religieuses qui sont ici présentes. Il est vrai que je ne vous avais parlé que des livres... Mais faisons le bilan : vous êtes catholiques, mais pas pratiquants, disons un peu protestants ou du moins dissidents. Ce n'est pas un reproche, c'est votre droit, votre liberté, chacun fait ce qu'il veut et c'est d'ailleurs aussi un peu le cas chez moi. Ainsi vous avez une crèche de Noël, dans le grenier, et un sapin. Vous les utilisez à la fin de l'année, « comme tout le monde », mais vous ne fêtez pas la Noël. Océane porte une croix sur sa poitrine, parmi ses tenues rose et noir. Mais elle n'est pas croyante du tout, elle trouve seulement cela joli. C’est un bijou, pas un symbole. Dans votre salon, on remarque de nombreux objets décoratifs indiens, égyptiens, et, dans le grenier aussi, asiatiques. C'est un beau mélange de cultures et de religions. Océane est aussi empreinte de philosophies orientales et de culture celtique, elle s'embrouille d'ailleurs avec le Yin et le Yang, la lumière et l'obscurité. Vous, Madame, vous rencontrez un marocain qui vous lance une "malédiction" à l'africaine dirions-nous. Et pour finir, vous nous apprenez qu'il se pourrait bien que votre père ait été juif. Dans les conditions présentes, il n'est pas étonnant que vous ayez contracté une EPS (entité polymorphe secondaire[6]) ou que quelques entités sévissent chez vous. Cela provient de l’ensemble des dysharmonies et des conflits que vous accumulez sans trop le savoir. Je vais maintenant vous en débarrasser.

[6] Voir l'affaire Milmort

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